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LA CHRONIQUE DE LA SEMAINE ÉCOULÉE

La chronique de la semaine écoulée du 05 05 25

Elizabeth Nouar
4 mai 2025 à 22:59
Vont-ils sortir du conclave en annonçant : "Habemus pactum !"

Concilier l'inconciliable. C'est le pari que fait le ministre des outremers.
Mais ce n'est pas gagné ! On a même envie de dire que c'est peine perdue.
Concilier l'inconciliable c'est au mieux, une antithèse voire un oxymore. C'est au pire, une contradiction, une impossibilité, un objectif irréalisable. 
Et pourquoi se fixer un objectif que l'on ne pourra pas atteindre ?
Manuel Valls veut concilier l'aspiration à l'indépendance et l'attachement à la France et "tout cela, dit-il, nous oblige à trouver une voie originale et inventive et à faire preuve de responsabilité."
Plus facile à dire qu'à faire et jusqu'à présent, on a surtout l'impression que l'on tâtonne et que l'on bricole. Le ministre avait proposé un premier projet d'accord politique qui devait être retravaillé et amendé mais le FLNKS a déclaré que ce document ne le satisfaisait pas. Le ministre avait promis un deuxième projet mais, malgré ses engagements, il ne l'a pas encore mis sur la table.

Il faut dire que, d'après ce qu'en disent ses interlocuteurs, on est encore loin du compte. Ce serait, en fait, un projet d'indépendance qui évoque la pleine souveraineté mais en union avec la France. Ce serait un projet qui parle de transfert des compétences régaliennes avec délégation à l'Etat. 
Au simple énoncé de ces mots, vendredi matin, les partisans de la France ont exprimé leur profond désaccord et obtenu, après seulement deux heures de séance plénière, une suspension des discussions. 
De son côté, le FLNKS exprime – et on le comprend – sa satisfaction. Il estime que les discussions en cours avec l'Etat se déroulent dans un climat respectueux et constructif.
En clair, pour l'instant, le projet d'accord satisfait l'un des camps mais pas l'autre et l'on n'a rien concilié du tout. Et pourtant, les représentants de l'Etat pensaient avoir trouvé la formule parfaite. La souveraineté, pour faire plaisir aux indépendantistes et des compétences accrues aux provinces, pour faire plaisir aux partisans de la France.
Ils pensaient que cela suffirait à concilier l'inconciliable !

On est d'ailleurs plutôt déçu sur leur capacité à trouver une voie originale et inventive parce que l'on a l'impression d'un sinistre retour en arrière quand, il y a 40 ans, Edgar Pisani se heurtait à la même équation : "la France ou l'indépendance ? L'indépendance ou bien la France ?" Et déjà, il proposait la mauvaise solution. Celle de l'indépendance association. En 40 ans, l'imagination n'a pas beaucoup progressé au plus haut sommet de l'Etat. 

Enfin, pas au plus haut sommet parce que – l'on ne veut froisser personne – mais il se dit que le Président de la République suit de très près ce qui se passe à Nouméa. Et il se dit aussi – mais ce ne sont peut-être que des rumeurs – que lui, qui est garant de l'intégrité nationale, ne validerait pas un quelconque projet d'indépendance. 

Mais Manuel Valls et Éric Thiers n'ont pas dit leur dernier mot. A partir de cet après-midi, ils enferment tout le monde sous clef – c'est la signification du mot conclave – pendant deux jours et demi, pour tenter de concilier l'inconciliable et d'aboutir à un accord.

Parce que cet accord, le ministre des outremers le veut à tout prix ! Il nous a assez répété que c'est "un accord ou le chaos". Et ce n'était peut-être pas le bon mot à employer parce que justement, le chaos, on sait ce que c'est. On l'a vécu il y a près d'un an et l'on s'étonne même que certains des responsables de ce chaos soient autour de la table et que le ministre accepte de les associer – comme si de rien n'était – à la recherche d'un accord. 

Mais en 1988, on avait déjà le sens de la formule et on avait dit que les accords de Matignon avaient réussi à "concilier les antagonismes". C'est plus réaliste que concilier l'inconciliable. 
Et avec le prolongement de l'Accord de Nouméa, ça a donné à la Calédonie trente ans de paix et de prospérité. Il reste deux jours aux délégations pour trouver la formule magique et pour sortir du conclave en annonçant : "Habemus pactum" "Nous avons un accord !"

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