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LA CHRONIQUE DE LA SEMAINE ÉCOULÉE

La chronique de la semaine écoulée 15 07 25

Elizabeth Nouar
14 juillet 2025 à 20:06
Les indépendantistes peuvent se prévaloir d'avoir gagné la bataille des mots et des symboles. Mais les partisans de la France ont gagné la bataille des faits et des réalités.

Et voilà que la Nouvelle-Calédonie est devenue un Etat ! 
Ça, on ne l'avait pas vu venir !
Un Etat dans l'Etat. Un Etat improbable et inédit. 
Un Etat dont, en réalité, on ne sait pas trop ce qu'il est. 

L'accord signé à Bougival parle "d'une organisation institutionnelle "sui generis" de l'Etat de la Nouvelle-Calédonie au sein de l'ensemble national inscrit dans la Constitution de la République française." 
Une formule alambiquée autour de laquelle les constitutionnalistes commencent à s'écharper.
Etat associé, Etat fédéré ou Etat de papier ? Il va falloir lever les ambiguïtés.

Alors, certes, la Nouvelle-Calédonie a l'habitude d'innover, d'inventer, de casser les codes mais si les juristes se sont arraché les cheveux, au moment de l'Accord de Nouméa, on leur souhaite bien du plaisir pour traduire dans la loi, l'étrangeté juridique qui a été créée à Bougival, au terme de 10 jours de négociations suivis d'une nuit blanche. 

Un accord arraché au bout de la nuit et qui a le mérite d'exister. Il est censé ramener l'apaisement, un an après le déchainement des violences insurrectionnelles et il doit permettre la reconstruction voire la relance économique. Il offre, enfin, une sortie à l'Accord de Nouméa même s'il le prolonge et s'en inspire en de nombreux points.

Mais, même Manuel Valls s'en est inquiété, cet accord représente en quelque sorte "un saut dans le vide", tant il soulève des interrogations. Tant il va être interprété différemment – comme de juste – par les indépendantistes et par les partisans de la France. 

Les premiers peuvent se féliciter de l'existence d'un État qui pourra être reconnu par la communauté internationale, de la création d'une double nationalité, de l'existence d'une loi fondamentale qui consacre la capacité d'auto organisation de la Nouvelle-Calédonie et de la possibilité de transfert des compétences régaliennes. 
Les indépendantistes peuvent se prévaloir d'avoir gagné la bataille des mots et des symboles.

Mais de leur côté, les partisans de la France ont gagné la bataille des faits et des réalités. Et d'abord, parce que cet accord est pérenne, durable, qu'il n'est pas transitoire. La Calédonie est française, sans limite dans le temps. Son statut – aussi bizarre qu'il puisse être – sera inscrit dans la Constitution de la République. Cet accord lève, enfin, l'hypothèque des référendums d'autodétermination qui, depuis 40 ans, ont divisé, fracturé et antagonisé, la société calédonienne.

Les partisans de la France peuvent, aussi, revendiquer plusieurs avancées comme l'ouverture du corps électoral, le rééquilibrage de la représentation au congrès au bénéfice de la Province Sud, la reconnaissance des provinces comme échelon privilégié avec des compétences accrues en matière fiscale. Ils peuvent, en outre, relativiser la possibilité de transfert des compétences régaliennes, qui est soumis à un mécanisme très contraignant avec une majorité qualifiée et un possible veto de l'Etat. 

Objectivement, cet accord peut satisfaire les deux camps et, en même temps, il peut ne satisfaire personne tant il y a eu des concessions de part et d'autre, mais c'était indispensable pour parvenir à un accord qui, il y a peu, paraissait impossible.

Et on est loin de l'accession à la pleine souveraineté qui était le seul sujet dont voulait parler le FLNKS qui faisait, du projet Valls, le socle de toute négociation.  

Aujourd'hui tout reste à faire. Il faut traduire dans la loi l'accord politique signé à Bougival et il faut qu'il soit approuvé par les calédoniens et par le parlement.

"Vous avez inventé un chemin" a déclaré Emmanuel Macron aux partenaires calédoniens mais ce chemin va être long.  
Et peut-être que, finalement, la Nouvelle-Calédonie restera un Etat "sui generis" ad vitam aeternam...

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