
La chronique de la semaine écoulée
17 août 2020 à 01:30Dans moins de 50 jours, 48 exactement, les calédoniens seront appelés à dire OUI ou NON l'indépendance.
Mais ils sont de plus en plus nombreux à se demander pourquoi et à quoi ça va servir.
A se compter, certes !
Mais le résultat est globalement connu d'avance et chaque camp va seulement tenter de grappiller quelques points, quelque pourcentage.
Celui qui aura progressé par rapport à 2018, criera victoire mais il saura que rien n'est joué, qu'il y a un troisième référendum et que, de toute façon, cette troisième consultation ne réglera rien non plus et n'apportera aucune solution d'avenir.
Celui qui aura régressé sera contrarié, humilié, inquiet, mais il se dira qu'il y a un troisième référendum et qu'il pourra faire mieux dans deux ans même si cette troisième consultation ne réglera rien non plus et n'apportera aucune solution d'avenir.
En espérant que personne ne vienne contester les résultats du scrutin !
Dans ce contexte binaire et frontal, on s'amuse de voir, de part et d'autres, des francs-tireurs qui défendent un OUI ou un NON différents.
"Écris ton NON", N.O.N proclame Calédonie ensemble qui prétend que son NON n'est pas le même que celui des six partis regroupés dans les Loyalistes. Elle affirme que c'est un NON d'ouverture, un NON respectueux du OUI des indépendantistes, un NON calédonien et un NON de projet.
Cela n'a aucun sens.
Mais on voit la même attitude chez les indépendantistes où vient d’apparaître le OUI du MNSK qui prétend défendre un OUI très différent de celui prôné par le FLNKS, qu'il accuse d’avoir depuis 30 ans favorisé la bipolarisation de la Nouvelle-Calédonie.
Dans un autre contexte, ces contorsions seraient risibles. Tout le monde sait que, le 4 octobre, dans les urnes, on décomptera seulement les NON et les OUI, sans distinction.
Mais ces arguties révèlent sans doute un vrai malaise de la société calédonienne et singulièrement de sa classe politique. Tous ceux qui, il y a deux ans encore, étaient arc-boutés sur l'organisation des référendums et qui ne voulaient pas entendre parler de solution alternative, commencent à réaliser qu'ils ont fait fausse route.
Les uns estimaient avoir droit à ce scrutin d'autodétermination prévu par l'Accord de Nouméa qu'il fallait respecter à la lettre.
Les autres ne voulaient pas être privés d'une victoire annoncée.
Et au final… Tout le monde a été déçu. Les partisans du maintien dans la France parce qu'ils s'attendaient à un score plus large. Les indépendantistes parce qu'ils ont réalisé qu'ils n'arriveraient jamais à combler leur retard électoral.
Tous déçus aussi, parce qu'ils ont compris, les uns et les autres, que ces référendums binaires et brutaux étaient une régression par rapport au processus exemplaire que vit la Calédonie depuis trente ans.
On ne peut pourtant pas dire qu'ils n'avaient pas été prévenus mais certains ont mis longtemps à comprendre. Et aujourd'hui – à l'exception notable de certains indépendantistes enfermés dans des positions doctrinaires et idéologiques – tout le monde veut discuter, tout le monde veut dialoguer, tout le monde explique qu'il faut laisser la place à la concertation, trouver une solution, rechercher un nouvel accord.
Ce sera après les référendums, après le deuxième, après le troisième ?
En espérant toutefois que la prédiction de Michel Rocard ne se réalise pas. Il avait espéré, en son temps, que la question posée au référendum _"_ne soit pas choisie de manière à diviser les Calédoniens en deux paquets égaux. Parce que là, disait-il, on est sûr qu’ils recommenceront à se taper dessus !"
Mais après tout, même Michel Rocard pouvait se tromper.