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Les détails sur le procès d'Olivier Pérès, condamné à 20 ans de prison

11 mars 2022 à 06:55
Les détails sur le procès d'Olivier Pérès, condamné à 20 ans de prison

Au dernier jour d'un procès surréaliste par bien des aspects, la cour d'Assises de Nouméa avait retrouvé ce matin le ton et le silence propres à la solennité du moment : le réquisitoire du ministère public. Après quatre jours de débats contradictoires au cours desquels se sont mêlés tous les éléments d'un mauvais polar, l'adultère, la machination, l'emprise, le mensonge, l'affaire Pérès n'a pas laissé apparaître une vérité, mais deux.


Pour le ministère public, le dossier est clair : Olivier Pérès a tué l'amant de sa femme, en prenant le soin de préparer sa défense avant même d'avoir commis le crime. Pendant les 15 jours qui précèdent le 13 septembre 2018, il avertit tout le monde qu'Eric Martinez veut le tuer, s'entraine avec un fusil à canon scié sur des cibles en forme d'animaux, et trois jours avant le meurtre, il envoie à sa femme la radio d'un crâne transpercé par une flèche d'arbalète avec cette légende : "les enfants ne risquent plus rien." Des faits avérés dans le dossier qui selon l'avocat général Christian Pasta démontrent que l'accusé a prémédité son geste, et que son discernement n'était pas aboli au moment où il a achevé Eric Martinez d'une troisième cartouche de chevrotine alors qu'il était à terre.


Et puis il y a le livre dans lequel Olivier Pérès s'en prend violemment à l'avocat général Pasta, renommé Rasta, ce chacal à la robe rouge tâché du sang de ses victimes. Et dans lequel il décrit en détails la terreur incontrôlable que lui inspirait Martinez. On se demandera d'ailleurs longtemps comment Olivier Pérès, chirurgien de renom, a pu gober les sornettes que racontait Martinez, un homme d'1m67 pour 90 kilos qui se prétendait colonel de la DGSE et capable de détourner des satellites pour protéger Mathilde Pérès au Vietnam. Le ministère public se demande alors si cette jeune femme n'aurait pas par hasard un rôle central dans l'affaire. Eric Martinez était très amoureux d'elle. Il voulait refaire sa vie, lui avait préparé une maison, et il était effondré qu'elle ait renoncé à leur liaison.
Avant de réclamer à la cour d'assises 18 ans de réclusion criminelle, Christian Pasta conclut : "le diable existe, mais il n'est pas dans l'urne où reposent les cendres d'Eric Martinez. Il est assis dans le fauteuil de l'accusé."


C'est ensuite l'avocat de la défense, maître Loïc Henriot, qui rejoint lentement le centre de la salle. D'une voix très assurée, il commence par reconnaître le comportement parfois très arrogant de son client. "Le livre, je n'étais pas d'accord. J'ai failli ne pas venir à cause de ça." Mais doit-on juger un homme à l'aune de son comportement interroge l'avocat, qui à son tour a livré sa vérité.


Selon lui, Olivier Pérès ne peut pas avoir inventé tout ça. Il ne peut pas avoir feint la terreur. Les rapports psychiatriques sont d'accord avec çà. Olivier Pérès n'est pas le calculateur froid et méthodique que tente de décrire la partie civile, mais un homme terrorisé qui monte la garde la nuit devant son portail, prévient la police et la justice sans être entendu, sans qu'aucune réponse ne soit apportée à son agitation. Pour maître Henriot, il n'y a pas eu préméditation mais bien altération du discernement. La crédulité est une faiblesse, pas une faute. "On juge ici la vie d'un homme, ce n'est pas un cirque. Vous devez le juger en frère, et je vous demande de ne pas écrire sur son front que c'est un assassin. Et si vous admettez qu'il avait affaire à une représentation du danger et non à un danger réel, posez-vous la question de la légitime défense."


Dans tous les procès d'assises, l'accusé a la parole en dernier. Mais lorsque le président Billon lui demande s'il a quelque chose à déclarer avant la fin des débats, à la surprise générale, Olivier Pérès se tait et se rassoit.


A 14h, les jurés commencent leur délibéré dans la salle des assises en raison des contraintes de distanciation liées à la crise Covid. Et la petite foule des amis et des curieux doit attendre dehors. Trois heures plus tard l'intime conviction des jurés est faite et le verdict tombe : 20 ans, les jurés sont allés au-delà des réquisitions du ministère public. Olivier Pérès est coupable d'avoir tué Eric Martinez, d'avoir prémédité son geste, et même si l'altération de son discernement a bien été retenu par la cour d'assises, elle n'a pas utilisé la possibilité que lui offrait le code pénal de réduire la peine.


Salué silencieusement par ses amis et sa famille d'un signe de la main, le docteur Pérès est reparti dans un fourgon de police, direction le Camp-Est. Il a dix jours pour faire appel de ce verdict.

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